vendredi 8 août 2014

YOU’RE THE WORST, ROM COM TRASH DE L’ÉTÉ















You’re the Worst, ou comment lancer un défi à l’esprit critique qui sommeille dans chaque sériephile. Créée par Stephen Falk, qui a officié sur quelques épisodes de Weeds, la nouvelle série FX renferme de nombreuses maladresses et anomalies. Pourtant, et contre tout attente, You’re the Worst est terriblement attachante et devrait faire partie des réussites de l’été.


Le pitch


You’re the Worst, c’est l’histoire de deux beaux dégueulasses égocentriques sévissant à Los Angeles. Gretchen, sorte de Jessica Day (New Girl) version trash, est une attachée de presse pas farouche pour un sou, avec une tendance à l’autodestruction. Elle rencontre à un mariage Jimmy, écrivain britannique cynique et antipathique à souhait.

Sans surprise, les deux dépravés vont tomber dans ce piège tendu maintes et maintes fois par les scénaristes, et commencer à s’apprécier.


You’re the Worst, pas la pire des comédies romantiques


You’re the Worst ne révolutionne pas le monde des séries et a même de quoi rebuter à première vue : ouverture des plus artificielles, tendance à la vulgarité, personnages secondaires qui frisent l’inutilité. Ajoutez à cela un scénario et une réalisation un peu bancals et la coupe aurait pu être pleine. Et pourtant…


Deux bons acteurs et des répliques qui font mouche


Et pourtant, la série est véritablement attachante. Première explication : les comédiens. Inconnus de ce côté de l’Atlantique (et pas vraiment célèbres de l’autre), ils font le boulot, et le font même bien.

Chris Geere fait vite oublier le stéréotype de son personnage. À mi-chemin entre Jim Jefferies (Legit) et Gregory House, il se complaît dans ses répliques assassines et une aversion de son prochain au final plutôt marrante. De son côté, Aya Cash remplit parfaitement ce rôle de paumée solitaire et mimi que l’on a envie de prendre dans ses bras.

Si le duo est plaisant, la force de la série tient surtout dans ses répliques. Trashs et bien senties, parfois réjouissantes ou grinçantes, elles touchent au but : elles font rire.

Que le plaisir soit coupable ou assumé, You’re the Worst est une comédie romantique qui a du charme. Reste à espérer qu’elle ne franchisse que modérément la limite du mauvais goût, cette frontière de l'humour si mal surveillée.

Transatomètre : niveau 3



mercredi 9 juillet 2014

THE LEFTOVERS, QU'EST-CE QUI CLOCHE?

Diffusé depuis le 29 juin dernier, ce drame-fantastique du créateur de Lost en a laissé plus d’un sur sa faim. Début d’explication.
















Plusieurs mois que The Leftovers attise la curiosité des sériephiles, que l’on entend vaguement parler du prochain boulet de canon HBO, à coups de teasing et du bouche à oreille du web. Le casting attire l’œil, avec notamment Justin Theroux et Liv Tyler. Pourtant, The Leftovers ne suscite pas l'émoi attendu.

Série HBO, mais série de l’été


Ce n’est sans doute pas un hasard si HBO a décidé de programmer The Leftovers durant l’été. La série est plus évoluée et moins teenager que Under the Dome par exemple, mais The Leftovers, sans être une mauvaise série, laisse planer un sentiment de gêne. Un peu comme si Damon Lindelof et Tom Perrotta tentaient de dissimuler le manque de souffle des intrigues par des mystères qu’ils vont, semble-t-il, nous cacher jalousement jusqu'au bout. On peut saluer cette volonté de ne pas tomber dans la facilité du cliffhanger à tout prix, mais cette lenteur pose problème.

The Leftovers, c’est (trop) lent


Alors oui, parfois la lenteur a son charme et elle est même parfois utile. Mais se reposer entièrement dessus dans une série fantastique est un pari risqué. Dans The Leftovers, plus que du mystère, c’est de la confusion qu’elle engendre, voire même de l’irritation. La lenteur se transforme ici en lourdeur et les deux premiers épisodes deviennent parfois exaspérants.

Les facilités de The Leftovers


Comme toute série de genre qui se respecte, il y a bien sûr des codes, des modèles et donc des clichés qui se répètent inlassablement. Le plus irritant ici est cet appât de la possible folie du personnage de Justin Theroux, auquel The Leftovers tente de nous faire mordre. On ne goûte que très peu à ce type de leurre réchauffé qui, espérons-le, ne se fait pas le prophète d’une fin tirée par les cheveux jusqu’à la racine.

Je le répète, The Leftovers n’est pas une mauvaise série, mais une version plus raffinée et subtile des habituelles merdouilles fantastiques de l’été.

Transatomètre : niveau 2


jeudi 8 mai 2014

LOUIE REVIENT AVEC TOUT SON MAL-ÊTRE, RÉJOUISSEZ-VOUS

Louie a enfin fait son retour le 5 mai sur FX, après avoir mis notre patience à rude épreuve. Il est tout excusé, l‘effet est toujours aussi délectable.
















Le thème musical jazzy est éternellement omniprésent, les situations toujours aussi absurdes, voir incommodantes, Louie est bien de retour. Enfin, car le paysage comique des séries, qu’il soit américain ou non d’ailleurs, a toujours bien du mal à se renouveler.

Louie, objet sériel non identifié


Depuis maintenant 4 ans, Louie incarne ce renouveau. Difficile pour autant de classer la série dans la catégorie des comédies, tant Louis C.K. a su faire de cette autofiction un objet sériel non identifié.

C’est aussi ce qui fait la réussite de Louie. On peut vanter les mérites de cet humour grinçant, porté par ce personnage mélancolique s’interrogeant quotidiennement sur l’absurdité de son monde. Mais Louie ne peut être résumé qu’à ce trait de caractère. Il ne faut pas oublier ce qui est l’essence même de la série, et qui est lié au talent de Louis C.K. : sa capacité à se réapproprier les règles scénaristiques.

Le scénario d'un promeneur solitaire


C’est aussi ça le génie de Louie : des épisodes sans aucunes trames narratives apparentes, et pourtant d’une efficacité terrible.

La reprise de cette nouvelle saison confirme ce style sans pareil. Ce qui compte chez Louie, ce n’est pas tant de raconter une histoire, mais plutôt une série d'événements. Le plus important, ce sont les pérégrinations qui vont l'amener à subir des constats doucement amers. Cette soumission au réel l'aidera pourtant à enrichir des sketchs hilarants, bien que souvent empreints d'un profond malaise.

C’est donc ainsi que l’on peut découvrir ce bon vieux Louie être réveillé par les éboueurs, aller chez les médecin, faire une partie de poker ou cuisiner pour ses filles. Beaucoup d’épisodes sont en fait une suite de pastilles sur le quotidien. Un procédé qui peut être désarçonnant pour les habitués des standards imposés par les sitcoms.

Une série "à propos de rien" ?


Seinfeld était une série "à propos de rien", il y a un peu de ça chez Louie. En apparence en tout cas. Car il parvient toujours à s’extirper de cette seule dimension comique, pour nous emmener ailleurs. Quelque part, dans des lieux indéfinissables, le comedian se permet des séquences à la limite du cinéma expérimental.

Au final, Louis C.K. fait ce qu’il veut. Auteur, réalisateur, acteur et monteur, il est celui qui incarne le mieux cette notion galvaudée de série d’auteur. A ce petit jeu, c’est bien lui le meilleur.

Transatomètre : niveau 4




mardi 1 avril 2014

HIMYM : À L'AGONIE, LA BÊTE A ÉTÉ PIQUÉE

Avant-propos : très utilisé dans cet article, le « on » peut être remplacé par un « je » plus en phase avec la subjectivité de l'auteur.















How I Met Your Mother, c’est d’abord l’histoire d’une lente agonie. L’irrémédiable chute d’une narration audacieuse enfermée depuis de longues saisons dans un de ses flashbacks. Des flashbacks qui avaient pourtant fait tout le charme et l’originalité du successeur de Friends.

Tout avait si bien commencé. Carter Bays et Graig Thomas nous avait mis une belle baffe en dépoussiérant un procédé cinématographique critiqué pour sa facilité. Le concept séduisait, mais on savait aussi que la série tiendrait difficilement un rythme aussi brillant et jubilatoire, qui a tant mis à l’épreuve la résistance de nos zygomatiques.

HIMYM : la mort à petit feu


Il y a aujourd’hui, lorsque l’on regarde un épisode de HIMYM, une désagréable froideur d’après fête et l’impression d’une série qui s’est regardée mourir à petit feu. Au contraire de Friends, qui malgré deux dernières saisons un peu maladroites, avait réussi à conserver son niveau d’exigence avec notamment un final mémorable. Même ceux qui sont morts à l’intérieur avaient dû y laisser une larme.

Alors on a continué. On ne sait pas vraiment pourquoi d’ailleurs. On s’est forcé. On a poussé le vice si loin que l'on a pu même désespérer devant ces situations invraisemblables et un humour réchauffé au micro-onde. En tout cas, on est allé jusqu’au bout. Ils nous ont si bien divertis pendant 4 saisons, on leur devait bien ça. Et puis, on s’attendait peut-être à un miracle. Ou peut-être que l’on voulait simplement savoir qui était la mère bordel. Difficile de trancher.

Un patchwork de grosses ficelles


Que l’épisode final soit réussi ou pas importe peu. Les dés ont été jetés dans les méandres du souvenir d’un bon épisode depuis bien trop longtemps. Cette conclusion symbolise d’ailleurs à merveille ce que la série est devenue: un brouillon temporel et un patchwork de grosses ficelles usées jusqu’à la dernière fibre. On ne peut que respecter l’envie des scénaristes d’innover, de ne pas vouloir s’enfermer dans les carcans de la comédie. Seulement, pour les fans de série, le métier de scénariste est comparable à celui de chirurgien à cœur ouvert : on ne félicitera son audace que s’il réussit son opération.

Ne soyons pas trop durs. Il y a bien un petit pincement au cœur de savoir qu'on ne verra plus ces personnages qui nous ont accompagné pendant 9 longues années. Un peu comme lorsque oncle Bill s’incruste à la maison pendant plusieurs mois. On ne le supporte plus, on aimerait qu’il taille la route. Il finit par partir un banal lundi matin. Et sournoisement, il nous manque un peu. On aimerait presque l’appeler et lui dire de revenir. Mais dès le lendemain, on est soulagé d’être parvenu à la boucler. Il est enfin parti, et c’est mieux pour tout le monde.

Par respect pour le passé glorieux de la série, j'ai décidé de ne pas soumettre cet épisode final à l'impitoyable Transatomètre.

mercredi 22 janvier 2014

TRUE DETECTIVE : UN DUO DE FLICS DYSFONCTIONNEL

HBO a lancé la semaine passée la mini-série True Detective. Matthew McConaughey et Woody Harrelson y incarnent un duo de flics dysfonctionnel enquêtant dans les Bayous de la Louisiane.



















Ma sériephilie est-elle donc incompatible avec le marché du travail ? Les managers se sont-ils perdus dans les méandres des objectifs de rentabilité ? Toujours est-il que mon abandon de poste n'est pas passé comme une lettre à la poste à l'usine de jus de pomme. Il me faut un job plus souple, où les relations humaines priment sur la productivité.

Je suis donc allé sonner à la porte de la sécurité sociale. Les nombreux retards de remboursements qu'ils m'ont fait subir ces derniers mois me laissent espérer des conditions de travail décontractées. Leur ouverture d'esprit n'est en fait qu'un mythe et j'ai été renvoyé manu militari par un duo de flics vers la sortie, ayant à peine eu le temps d'énoncer mes motivations.

Je suis rentré chez moi, pataud, tentant de trouver sur le chemin de ma défection, une solution à mes problèmes financiers. Rien est venu, sinon que j'ai raté le début de True Detective la semaine dernière. Alors, je me suis mis à courir. Je me suis mis à voler, à la recherche du temps perdu devant mon écran.

Une bonne série noire


True Detective, c’est un pitch de polar tout simple : un duo de flics enquête sur la mort d’une prostituée assassinée selon un rite occulte. En revanche, le traitement est original. L’enquête s’étale sur 17 ans. On pense au Zodiac de David Fincher.

True Detective, c’est surtout une paire de flics dysfonctionnelle…qui fonctionne : tout oppose Rust Cohle (McConaughey) et Martin Hart (Harrelson). Mais leurs disparités les rendent complémentaires. Hart représente le détective respecté par tous et en apparence bon père de famille. Un flic de la vieille école aux idées bien arrêtées et légèrement macho sur les bords.

Il doit faire équipe avec Cohle, l’étranger (il vient du Texas). Un taiseux solitaire à l’allure filiforme. Cohle, c’est la puissance de l’instinct au moyen d’un flair hors norme affûté par une addiction au Quaaludes (un puissant sédatif). Il fascine par ses regards comme connectés à un étage supérieur de perception.

Une réalisation suffocante


Dans True Detective, on ne s’affole pas. La réalisation est traînante, comme sonnée par des somnifères. La caméra se déplace lentement. Tout comme les personnages. Ce rythme calme sert sur un plateau les grosses répliques qui claquent, magnifiées par les voix rocailleuses des deux acteurs. Une vraie série de genre qui ne tombe (pour l’instant) pas dans la caricature.

Le showrunner novice, Nic Pizzolatto, est né à La Nouvelle-Orléans. Et ça se voit. L’atmosphère subtropicale du Bayou s’agglutine à l’image et ne la quitte plus. Pizzolatto connait la région et nous emmène dans les recoins invraisemblables de ces terres, qui l’ont vu écrire son premier roman : Galveston est un road-trip entre La Nouvelle-Orléans et le Texas.

Un casting de revenants


Le format de la mini-série sied comme un gant à McConaughey, qui peut déployer les failles de ce personnage torturé et/ou étrange qui le caractérise désormais (Killer Joe, Mud, Eastbound and Down, Les Loups de Wall street). Woody Harrelson revient également au premier plan. Celui qui était notamment connu pour son rôle de Mickey Knox dans le Natural Born Killer d’Oliver Stone, est en ce moment à l’affiche des Brasiers de la colère, de Scott Cooper.

Tremé fraîchement éteint et Boardwalk Empire s’en allant l’année prochaine, HBO se doit désormais d’assurer la relève. True Detective s’en tire plus que bien et pourrait bien incarner ce nouveau souffle.

Transatomètre : niveau 4